Khoutba centrale : « La patience (sabr) – une leçon pour une vie paisible »

Le sabr, c’est-à-dire la patience, est l’une des qualités fondamentales qu’un croyant doit cultiver. Cela implique la constance dans l’adoration (ibadat), la retenue face aux péchés, et la patience face aux épreuves et aux malheurs. Le sabr n’est ni faiblesse ni passivité, mais plutôt une force issue de la foi et de la confiance en Allah. C’est une solidité intérieure qui aide l’homme à rester calme et maître de lui-même, peu importe les circonstances.

Le Coran souligne clairement la valeur du sabr :

« Cherchez du secours dans la patience et la prière – certes, cela est une lourde obligation, sauf pour les humbles. »
(Sourate Al-Baqara, verset 45)

« Très certainement, Nous vous éprouverons par un peu de peur, de faim, de pertes de biens, de personnes et de fruits. Et fais la bonne annonce aux patients. »
(Sourate Al-Baqara, verset 155)

« Allah aime vraiment ceux qui sont patients. »
(Sourate Al-Imran, verset 146)

« Les patients seront certes récompensés sans compter. »
(Sourate Az-Zumar, verset 10)

Le Prophète d’Allah ﷺ a dit :

« Celui qui s’efforce à être patient, Allah lui accordera le sabr. Et personne n’a reçu de don meilleur et plus vaste que le sabr. »
(Hadith rapporté par Boukhari, n° 1469, et Mouslim, n° 1053)

Il a aussi dit :

« Lorsqu’un malheur frappe un musulman, et qu’il dit ce qu’Allah a ordonné de dire : “Nous sommes à Allah et à Lui nous retournons. Ô Allah, récompense-moi dans ce malheur et accorde-moi quelque chose de meilleur en échange”, alors Allah lui donnera quelque chose de meilleur. »
(Mouslim, n° 918)

Il a encore dit :

« Celui qu’Allah veut guider sur le droit chemin, Il l’éprouve. Et celui qui fait preuve de sabr, Allah lui en augmente la mesure. Nul n’a reçu de don meilleur et plus ample que le sabr. »
(Boukhari, n° 1469)

Et :

« La grandeur de la récompense est à la mesure de l’épreuve. Lorsque Allah aime un peuple, Il l’éprouve. Celui qui accepte [l’épreuve] obtient la satisfaction d’Allah, et celui qui s’en montre mécontent, Allah sera mécontent de lui. »
(Tirmidhi, n° 2396, hasan-sahih)

Anas ibn Malik, qu’Allah l’agrée, rapporte :

Le Prophète ﷺ passa près d’une femme qui pleurait au bord d’une tombe. Il lui dit : “Crains Allah et fais preuve de sabr.” Elle répondit : “Laisse-moi ! Tu n’as pas subi ce que j’ai subi !” – Elle ne savait pas qu’il s’agissait du Messager d’Allah. Lorsqu’on le lui fit savoir, elle se rendit à sa porte, sans y trouver de garde, et dit : “Je ne t’avais pas reconnu.” Il lui répondit : “Le vrai sabr est celui qui se manifeste au premier choc.”
(Boukhari, n° 1283 ; Mouslim, n° 926)

L’un des plus beaux exemples de sabr est celui du compagnon Urwa ibn Az-Zubayr. Un jour, deux grandes épreuves le frappèrent : on dut lui amputer une jambe à cause d’une maladie, et ce même jour, son fils bien-aimé mourut. Lorsqu’il l’apprit, il dit :

« Ô Allah, à Toi reviennent les louanges. Tu m’as donné sept fils, Tu en as repris un. Tu m’as donné quatre membres, Tu en as pris un. Si Tu m’as éprouvé – Tu m’as épargné de nombreuses fois auparavant. Si Tu as repris – Tu m’as souvent donné. Et je Te demande, ô Allah, de me réunir avec eux deux au Paradis. »
(Adh-Dhahabi, Siyar A‘lām An-Nubalā’, 4/422)

Quelques jours plus tard, il entra chez le calife et y trouva un vieil homme au visage brisé et aveugle. Le calife lui dit : « Ô Urwa, demande à cet homme de te raconter son histoire. » Urwa lui demanda : « Quelle est ton histoire, ô shaykh ? » Il répondit :

« Ô Urwa, sache qu’un soir je me suis couché dans une vallée, en étant l’homme le plus riche que je connaisse, en biens, bétail et enfants. Cette nuit-là, un torrent s’est abattu et a emporté tous mes enfants, mes biens et mes troupeaux. Au lever du jour, il ne me restait plus rien, sauf ce visage brisé, ce dos courbé et mes yeux aveugles. Et j’ai dit : Ô Allah, si Tu as repris, Tu as aussi laissé. Si Tu m’as éprouvé, Tu m’as également préservé dans d’autres domaines. À Toi reviennent les louanges pour ce que Tu as repris, et à Toi les louanges pour ce que Tu as laissé. »
(Adh-Dhahabi, Siyar A‘lām An-Nubalā’, 4/423)

Quand le croyant est frappé par le malheur, il sait que rien n’arrive sans la volonté d’Allah. Il ne désespère pas, ne se soumet pas aux gens, mais se tourne vers Allah en disant :

« Nous sommes à Allah, et c’est à Lui que nous retournerons. »
(Sourate Al-Baqara, verset 156)

Il invoque Allah pour qu’Il lui accorde le sabr et la force :

« Ô notre Seigneur, verse sur nous le sabr, affermis nos pas et donne-nous la victoire sur les peuples mécréants. »
(Sourate Al-Baqara, verset 250)

« Seigneur, aide-moi, car ils me traitent de menteur ! »
(Sourate Al-Mu’minun, verset 26)

« Allah nous suffit ; Il est le meilleur garant. »
(Sourate Al-Imran, verset 173)

La question « Jusqu’à quand dois-je faire preuve de sabr envers les autres ? » se pose souvent lorsqu’on est épuisé par les injustices, les ingratitudes ou les comportements toxiques. Le croyant ne suit pas ses émotions, mais il tourne son regard vers son Seigneur. Le sabr n’est pas faiblesse ni résignation, c’est le choix conscient de supporter la difficulté pour plaire à Allah. La limite du sabr est mesurée par la miséricorde divine.

C’est pourquoi les paroles de Abu Bakr, qu’Allah l’agrée, sont si puissantes et lumineuses :

« Quand tu n’as plus de sabr envers quelqu’un, rappelle-toi combien Allah est patient envers toi. »
(Al-Jami‘ li Ahkamid-Din, Ibn Abdil-Barr, 2/324 – cette sagesse est transmise comme un dicton attribué à Abu Bakr)

(Khoutba centrale du chef de culte Hafiz Hilmija Redžić du 11 juillet 2025 à l’Association Islamique « Ihsan » à Dudelange)