Khoutba centrale : « Quand l’amitié est touchée par le froid de ce bas-monde » (galérie)
Le froid de ce bas-monde peut séparer même les cœurs les plus chaleureux. D’après Halid ibn ‘Umara al-‘Adawi (qu’Allah soit satisfait de lui), il est rapporté qu’il a dit :
« Le gouverneur de Bassora, Utba ibn Ghazwan, nous a adressé un discours. Il a loué Allah et ensuite a dit :
“Ce bas-monde a montré son caractère éphémère et s’éloigne de nous. Il ne reste de lui que ce qu’il reste du manche d’un récipient que son propriétaire tient en main.
Vous quitterez bientôt ce monde pour une demeure où rien n’est éphémère, alors partez avec vos bonnes actions.
Nous avons entendu dire qu’un rocher sera jeté du sommet de l’Enfer, et il tombera pendant soixante-dix ans sans atteindre le fond. Par Allah, il sera rempli ! Cela vous étonne-t-il ?
Nous avons aussi entendu dire que la distance entre deux portails du Paradis est celle d’un voyage de quarante ans, et un jour viendra où il y aura une grande affluence.
Je me souviens de moi-même, étant l’un des sept compagnons avec le Prophète (paix et salut d’Allah sur lui). Nous n’avions pour nourriture que les feuilles des arbres, si bien que nos lèvres se fendaient.
J’ai pris un manteau, je l’ai partagé avec Sa’d ibn Malik, et j’ai porté une moitié pendant que Sa’d portait l’autre. Aujourd’hui, il n’y a personne parmi nous qui ne soit devenu gouverneur d’une ville.
Je cherche refuge auprès d’Allah pour qu’Il me préserve de me voir grand à mes propres yeux, mais petit aux yeux d’Allah.” » (Muslim)
Le Coran met en avant la proximité des cœurs des croyants comme l’une des plus grandes bénédictions d’Allah. Dans la sourate Al-Imran, verset 103, Allah le Très-Haut dit :
« Et rappelez-vous le bienfait d’Allah sur vous, lorsque vous étiez ennemis et qu’Il a uni vos cœurs, et par Sa grâce vous êtes devenus frères. »
Dans la sourate Al-Anfal, verset 63, Allah dit :
« Il a uni leurs cœurs. Si tu avais dépensé tout ce qui est sur la terre, tu n’aurais pas pu unir leurs cœurs, mais c’est Allah qui les a unis. »
Dans la sourate Al-Hujurat, verset 10, Allah dit :
« Les croyants ne sont que des frères. Réconciliez donc vos deux frères et craignez Allah afin qu’Il vous fasse miséricorde. »
De même, dans la sourate Al-Fath, verset 29, Allah décrit les croyants comme étant bienveillants les uns envers les autres :
« Muhammad est le Messager d’Allah. Et ceux qui sont avec lui sont durs envers les mécréants, mais miséricordieux entre eux. »
Cette proximité et cet amour entre les croyants sont un signe de la miséricorde d’Allah et de Sa puissance.
Dans les cœurs des croyants réside le véritable bonheur
Notre bonheur dépend des autres dans la mesure où nous leur apportons de la joie, de la paix, ou à l’inverse des provocations, des insultes, des calomnies, ou de l’envie. Ces émotions et comportements se reflètent directement sur nous. Les émotions négatives envers autrui créent des déséquilibres dans notre vie personnelle.
Dans nos relations personnelles, non professionnelles, celui qui apprend à diriger ses émotions de manière positive devient une personne très appréciée dans son entourage. Non seulement il est aimé de son Seigneur s’il agit pour Lui, mais il est aussi aimé des gens grâce à l’énergie positive qu’il transmet.
On rapporte qu’Abou Darda (qu’Allah soit satisfait de lui) ne parlait jamais aux gens sans sourire. Sa femme lui disait :
« J’ai peur que les gens ne te prennent pour un fou (ou quelqu’un de peu sérieux), car tu souris tout le temps. »
Il répondait :
« Je n’ai jamais vu le Prophète (paix et salut d’Allah sur lui) parler sans sourire. » (Ech-chabâb wa el-mizâh, 26)
Le froid entre les cœurs des croyants ne peut être que temporaire
Salahuddin as-Safadi a mentionné dans son œuvre encyclopédique Al-Wafi bil-wafayat une histoire qui s’est déroulée entre Hassan al-Basri et Ibn Sirin.
À un moment donné, une distance et un refroidissement se sont installés dans leur relation. Lorsque le nom d’Ibn Sirin était mentionné devant Hassan al-Basri, ce dernier disait :
« Épargnez-nous de parler de ces tisserands », faisant allusion au fait que la famille d’Ibn Sirin était principalement composée de tisserands.
Par la suite, Hassan al-Basri fit un rêve étrange. Il se voyait nu, debout sur un tas d’ordures, frappant ce tas avec un bâton. Inquiet, il envoya un de ses élèves consulter Ibn Sirin pour interpréter le rêve, en lui demandant de ne pas mentionner qu’il s’agissait de son rêve.
Mais Ibn Sirin, sage et perspicace, répondit :
« Dis à celui qui a fait ce rêve : Ne demande pas à un tisserand d’interpréter ce rêve. »
Lorsque cette réponse parvint à Hassan al-Basri, il alla immédiatement voir Ibn Sirin. En le voyant, Ibn Sirin se leva, le serra dans ses bras, et ils discutèrent pour apaiser leur désaccord.
Hassan al-Basri dit alors :
« Abou Bakr, oublions ce qui s’est passé. Interprète plutôt ce rêve qui me préoccupe. »
Ibn Sirin répondit :
« Ne t’en fais pas pour ce rêve. La nudité que tu as vue représente la nudité de ce bas-monde, mais tu n’es pas de ceux qui recherchent ce monde. Quant au tas d’ordures, il représente ce bas-monde tel qu’il est en réalité. Quant au bâton, c’est la sagesse que tu transmets aux gens. »
Hassan al-Basri lui demanda :
« Comment savais-tu que c’était moi qui avais fait ce rêve ? »
Ibn Sirin répondit :
« Je ne connais personne de meilleur que toi qui aurait pu faire un tel rêve. »
Cette histoire nous rappelle l’importance de surmonter les désaccords et de préserver nos relations, car revenir à la vérité est toujours meilleur que persister dans l’erreur.
(Khoutbas centraux du chef de culte Hafiz Hilmija Redžić du 27 décembre 2024 au Centre Islamique Gazi Isa-beg et au Centre Islamique et Culturel Berat à Esch-sur-Alzette)