Khoutba central : « Le secret de la réussite réside dans la persévérance sur le chemin de la vérité »
L’homme moderne recherche souvent un « secret de la réussite », comme s’il s’agissait d’une formule cachée ou d’une technique qu’il suffirait de maîtriser une seule fois pour que tout change. Pourtant, le Coran, la Sunna et l’expérience de la communauté musulmane à travers les siècles montrent clairement que la réussite n’est ni le fruit du hasard, ni le produit d’une compétence humaine détachée de la foi, mais le résultat d’une idée claire, d’une intention sincère, d’une disposition au sacrifice et d’une vision à long terme.
Le Très-Haut dit :
« Les gens pensent-ils qu’on les laissera dire : “Nous croyons !” sans les mettre à l’épreuve ? » (Al-‘Ankabût, 2–3)
Ce verset brise immédiatement l’illusion selon laquelle on atteindrait la réussite et l’agrément d’Allah sans épreuves, sans prix à payer et sans efforts.
Trois principes, en apparence simples mais décisifs — l’idée, le sacrifice et la vision — sont à la base de tout projet sérieux : personnel, familial, social ou civilisationnel. Ils façonnent la conscience des personnes qui refusent la médiocrité et auxquelles Allah accorde la capacité de transformer le cours de l’histoire.
Aucune grande figure historique, aucun réformateur, savant ou penseur n’a atteint son objectif sans une idée claire qu’il portait au fond de son cœur et de sa conscience. En islam, cette idée est le tawhîd — l’adoration sincère et exclusive d’Allah et une vie conforme à Sa satisfaction.
Le Prophète ﷺ a posé le fondement de toute réussite islamique dans le hadith concernant l’intention :
« Les actions ne valent que par les intentions, et chacun n’aura que ce qu’il avait l’intention de faire. »
(Bukhârî, Bed’ul-wahy, 1 ; Muslim, Imâra, 1907)
L’idée, donc, naît dans le cœur. Mais une idée, en elle-même, n’a pas de poids tant qu’elle ne trouve pas un être humain prêt à la porter, la défendre, la vivre et se sacrifier pour elle. Cela apparaît clairement dans la vie du Prophète ﷺ : sa réussite n’était pas le fruit de circonstances politiques favorables, mais la force d’un homme porteur d’un message divin, prêt à supporter le boycott, l’isolement, les insultes, les attaques, l’Hégire et les combats — uniquement pour que la vérité parvienne aux gens.
L’idée du tawhîd n’est devenue lumière de civilisation qu’après des années de souffrance, mais aussi de renforcement spirituel de la première génération de croyants.
Les Compagnons ont poursuivi le chemin avec le même dévouement. La foi inébranlable d’Abû Bakr, qu’Allah l’agrée, notamment lors des crises comme les guerres contre les apostats, confirme qu’une idée ne peut survivre sans un homme organiquement lié à elle et prêt à porter son fardeau. Il a vécu selon le sens du verset :
« Ô vous qui croyez ! Si vous soutenez la cause d’Allah, Il vous soutiendra et affermira vos pas. » (Muhammad, 7)
Mus‘ab ibn ‘Umayr, qu’Allah l’agrée, au sommet de sa jeunesse et de son prestige à La Mecque, a volontairement abandonné le confort et les honneurs pour l’idée en laquelle il croyait. Il devint le premier prédicateur à Médine, l’enseignant des Ansar et l’un des principaux « architectes » de l’Hégire, préparant le terrain à la venue du Prophète ﷺ et à la formation du premier État islamique.
Bilâl ibn Rabâh, qu’Allah l’agrée, par sa simple mais immense proclamation « Aḥadun, Aḥad ! — Un, Un ! », incarne l’essence du tawhîd. Sous un soleil brûlant, une pierre sur la poitrine, il ne discutait pas, ne philosophait pas : il répétait ce en quoi il croyait. Ses mots sont restés un symbole de foi inébranlable à travers les âges.
La deuxième règle dit : il n’y a pas de réussite sans effort et renoncement, ni de renoncement sans engagement sincère. L’une des illusions les plus répandues de notre époque est de croire qu’on peut obtenir de grands résultats rapidement, sans prix, sans fatigue, sans patience.
Allah le Très-Haut dit :
« Pensez-vous entrer au Paradis sans qu’Allah ne distingue ceux d’entre vous qui luttent et ceux qui sont patients ? » (Âl ‘Imrân, 142)
Et Il dit :
« L’homme n’obtiendra que ce pour quoi il aura travaillé. » (An-Najm, 39)
La réussite n’est donc pas le fruit des souhaits, mais d’un investissement prolongé de soi dans l’idée à laquelle on croit. Le Prophète ﷺ a décrit la nature de ce chemin :
« Le Paradis est entouré de difficultés, et l’Enfer est entouré de passions. »
(Muslim, Jannah, 2822)
Tout ce qui mène au Paradis est, au début, difficile pour l’âme : la patience, l’obéissance, le renoncement, la pudeur, la lutte contre les passions, la persévérance dans l’adoration, le travail, la connaissance et l’éducation. Tout ce qui mène à la perdition est, au début, doux pour l’âme : les désirs, la négligence, le confort excessif, l’égocentrisme, la dépendance au regard des autres.
Lors de la formation de la première communauté à Médine, le Prophète ﷺ et les Compagnons ont traversé une période exceptionnelle de sacrifices : abandon de la patrie, pauvreté, siège, menaces constantes et batailles sanglantes. Ils étaient la preuve vivante qu’il n’y a pas de changement sans sacrifice et que rien de grand ne se construit du jour au lendemain.
Leurs vies relient deux dimensions : l’adoration nocturne et l’effort diurne. La nuit, ils se tenaient en prière, dans les supplications et les larmes ; le jour, ils travaillaient, combattaient, enseignaient, assumaient les responsabilités. Ils avaient compris que le prix du Paradis est précisément ce que la plupart des gens cherchent à éviter : l’effort, la patience et la constance.
La troisième règle dit : il n’y a pas de constance durable sans volonté forte, ni de volonté forte sans vision claire.
Une volonté sans vision n’est qu’une énergie dispersée ; une vision sans volonté n’est qu’un rêve.
Allah le Très-Haut dit :
« Allah ne modifie pas l’état d’un peuple tant qu’il ne modifie pas ce qui est en lui-même. » (Ar-Ra‘d, 11)
Ce verset nous enseigne que la vision n’est pas un souhait pieux qu’on attend, mais une direction qui exige un changement intérieur. Avant que ne change l’état d’une société, l’homme doit changer son cœur, ses habitudes, ses priorités et sa relation avec Allah.
Les grands dirigeants de l’islam, comme ‘Umar ibn al-Khattâb, qu’Allah l’agrée, n’étaient pas forts uniquement grâce à leurs capacités organisationnelles. Leur force résidait dans leur vision : une conception claire de la justice, de la responsabilité devant Allah, et de la perspective de l’au-delà. ‘Umar voyait le pouvoir non comme un privilège, mais comme un dépôt pour lequel il tremblait. Il passait ses nuits à parcourir la ville, ses jours à juger et organiser la communauté, conscient qu’il serait interrogé sur chaque décision.
La vision du croyant n’est pas seulement une vie meilleure ici-bas. Elle est l’agrément d’Allah, le Paradis, et la trace qu’il trouvera devant lui le Jour du Jugement. C’est pourquoi le Prophète ﷺ dit :
« Les actions les plus aimées d’Allah sont celles qui sont régulières, même si elles sont peu nombreuses. »
(Bukhârî, Riqâq, 18 ; Muslim, Musâfirîn, 215)
La continuité dans le bien est le signe d’une vision mûre. Celui qui a une vision ne brûle pas d’enthousiasme quelques jours seulement : il construit, patiemment, pendant des années.
Lorsque ces trois composantes se rejoignent — idée pure, disposition au sacrifice et vision claire — naît une personnalité exceptionnelle. Ces personnes ne sont pas seulement le produit de leur époque : elles façonnent leur époque. Elles ne craignent pas les épreuves qui accompagnent le progrès, ni le poids de la responsabilité. Elles mesurent leur vie à l’aune d’Allah, non à celle des hommes.
CONCLUSION : UNE GÉNÉRATION QUI REFUSE LA MÉDIOCRITÉ
À une époque de superficialité, de contenus instantanés et de logique du succès rapide, ces trois fondements deviennent essentiels :
– une idée qui purifie l’intention et nous ramène au tawhîd,
– un sacrifice qui façonne le caractère et distingue les sérieux des superficiels,
– une vision qui relie la vie d’ici-bas à l’au-delà et rend l’homme digne de l’avenir.
Allah le Très-Haut dit :
« L’homme n’obtiendra que ce pour quoi il aura travaillé. » (An-Najm, 39)
Celui qui comprend réellement ces paroles ne laissera pas son idée rester une simple pensée, son sacrifice un fardeau, ni sa vision un simple rêve. Tout cela devient un chemin vers Allah.
Sur ces principes naît une génération qui ne mesure pas sa vie aux circonstances dans lesquelles elle a vécu, mais à la trace qu’elle laisse derrière elle — une trace dans les cœurs, dans les œuvres durables et dans les invocations de ceux qui lui survivront.
(Khoutba centrale du chef de culte Hafiz Hilmija Redžić du 28 novembre 2025 au Centre Islamique Medina à Wiltz)